La peur est mauvaise conseillère…Lorsqu’on fait deux pas dans le noir et qu’on ose la différence, ce vieil adage populaire prend davantage encore de sens. Je l’ai moi-même expérimenté à chaque fois que je me suis engagé dans un projet inédit, comme je suis de nouveau en train de le faire.
Aucun doute : oser la différence, c’est affronter la peur. La sienne, d’abord, parce qu’il est terriblement humain d’éprouver de la crainte quand on se jette dans une aventure. Mais aussi la peur des autres, ces proches bien intentionnés qui tentent toujours de vous dissuader de prendre des risques. Quand on se lance dans l’inconnu, on dit souvent qu’on est seul. Je pense malheureusement que l’on est moins que seul ! « Ce n’est pas pour toi… » « Cela n’a pas de sens… » « Ne t’acharne pas… » Combien de fois ai-je entendu ce type de discours, émanant pourtant de gens qui ne me voulaient probablement que du bien ? Les conséquences peuvent se révéler désastreuses : quand on est pétrifié par la peur, on est toujours tenté de choisir des chemins maintes fois balisés et de s’entourer de gens qui paraissent nous ressembler. De se rassurer en allant au plus visible, alors que ce qui correspond à chacun d’entre nous est en réalité invisible ! La peur fausse l’instinct.
La différence, gage de réussite
Lorsque j’ai décidé de m’aligner sur le Vendée Globe, la peur de mes proches s’est révélée communicative. Il me fallait dénicher la bonne équipe pour m’accompagner dans ce défi fou. Guidé par la peur, j’ai bêtement imaginé qu’il ne pouvait s’agir que d’hommes de 50 à 55 ans, ayant déjà couru le Vendée Globe et bardés d’une expérience rassurante. Mon instinct me trompait. J’ai mis du temps à comprendre que j’avais en réalité besoin de personnes investies et compétentes qui allaient me donner confiance en moi. Des individus qui n’auraient rien à prouver et qui sauraient se mettre totalement au service du projet commun. Je les ai trouvés avec l’aide de Michel Desjoyeaux : Matthieu Hacquebart et Sam Goodchild étaient deux jeunes débutants en IMOCA, mais je me suis découvert avec eux beaucoup de ressemblances invisibles.
Aujourd’hui, j’ai choisi de faire un autre pas de côté pour me lancer dans un nouveau challenge : ma prochaine aventure est une exploration mondiale de la différence à bord d’un bateau d’expédition. Nous continuons notre quête des clés universelles de l’harmonie humaine, mais plutôt dans une odyssée « à la Cousteau » qu’à l’occasion d’un nouveau défi sportif. Bien entendu, le tempo de cette exploration de la différence est donné par les cinq principes de COMMEUNSEULHOMME :
- Oser la différence
- Faire confiance
- Innover grâce à la contrainte
- Viser l’harmonie
- Exulter
La décision n’a pas été facile à prendre. Grâce au Vendée Globe, j’ai acquis une place dans ce monde de la course au large qui m’a toujours fait rêver. La société revêt le skipper d’une cape de superhéros particulièrement flatteuse et rassurante pour celui qui l’endosse. J’ai donc pris le temps de la réflexion. Mais j’ai compris que pour continuer de porter le message de COMMEUNSEULUNHOMME, il était indispensable de faire un nouveau saut dans l’inconnu. « Il faut que tout change pour que rien ne change », décrète Tancrède dans Le Guépard, le fameux film de Luchino Visconti. J’ai donc décidé de m’appliquer à moi-même le premier de mes cinq principes d’action : oser la différence. Parce que je suis un explorateur de la différence, pas un coureur au large.
Mon nouveau bateau : Eternel féminin
Le plus visible des symboles de ce bouleversement, c’est mon nouveau bateau. Vendre Rua Hatu, l’Imoca avec lequel j’ai couru le Vendée Globe, fut pourtant un crève-cœur. Au cours de notre périple autour du monde, ses huit tonnes de carbone avaient pris vie et la tristesse m’a submergé lorsqu’il m’a fallu me séparer de ce compagnon fidèle. Mais je devais en passer par là pour cultiver l’état d’esprit de COMMEUNSEULHOMME. J’ai donc acquis une goélette franche de 21 mètres, dessinée par l’architecte néerlandais Olivier Van Meer et mise à l’eau en 2006. C’est une fille, en somme. Pour un marin, c’est radicalement différent, car cela transforme la manière de s’adresser à son bateau et de l’appréhender. Désormais, je ne dirai plus ‘’il’’, mais ‘’elle’’. Et cela m’enchante !
Elle aussi file sur l’eau, poussée par le vent. Mais à part cette caractéristique, cette goélette n’a rien de commun avec l’Imoca. Elle est à peine plus grande, mais beaucoup plus lourde. A bord, en comparaison des folles glissades du Vendée Globe, j’ai un peu le sentiment de naviguer à l’arrêt… et je m’en félicite ! Tandis que sur l’Imoca j’étais toujours dans l’action, je vais ici prendre le temps de la réflexion. Etre davantage attentif aux découvertes et aux rencontres que je vais faire. Prendre conscience de mes explorations et en faire le récit, de sorte que la communauté COMMEUNSEULHOMME s’agrandisse.
Visuellement, cette goélette est sublime. Je tenais absolument à cet aspect esthétique, parce que c’est quand on côtoie la beauté que l’on crée le mieux et que l’on façonne les liens humains les plus forts. Bien évidemment, elle sera baptisée COMMEUNSEULHOMME. Avec sa coque en acier et sa quille relevable, elle va nous permettre de naviguer sur tous les océans, y compris dans les endroits les plus hostiles.
Oui, j’ai bien écrit ‘’nous’’…
Car ces expéditions, je vais les partager avec ma compagne, Marie Lattanzio. Il nous était indispensable de créer ce nouveau projet ensemble. Non seulement parce que chacune de mes aventures a toujours été liée à mes questionnements d’homme et que cette relation en fait partie, mais aussi parce que Marie va y apporter son regard féminin. Avec nos deux visions différentes, nous pourrons encore mieux raconter nos découvertes aux personnes qui suivent COMMEUNSEULHOMME, en espérant qu’elles en tireront des enseignements universels.
Pour les convaincre de faire deux pas dans le noir à nos côtés, je fais de ma peur une amie et j’ai sans cesse à l’esprit que le chemin de la différence est la clé du bonheur. Parce que j’ignore quel sera notre itinéraire précis. Parce que je ne peux pas prédire les rencontres que nous ferons. Parce que plus qu’une page qui se tourne, c’est un nouveau livre qui s’ouvre. Quelle histoire y sera contée ? Je ne le sais pas. Et c’est justement cette incertitude qui est passionnante.
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